Nichée au cœur du plateau de Saqqarah, non loin des pyramides de Gizeh, s’étend une zone archéologique qui ne cesse de livrer ses secrets.
Chaque année, les archéologues y font des découvertes majeures, mais aucune n’a autant fasciné ni déconcerté que celle du Sérapéum, mise au jour le 1er novembre 1851 par Auguste Mariette, pionnier de l’égyptologie française. Depuis plus d’un siècle et demi, ce site souterrain hors du commun reste une énigme scientifique et architecturale, un défi silencieux lancé par les anciens Égyptiens à la compréhension moderne.

Un chef-d’œuvre d’ingénierie pharaonique
Pour Farouk Sharaf, consultant en restauration au projet du Sérapéum de Saqqarah, le lieu incarne un véritable miracle technique :« Les anciens Égyptiens ont dépassé leurs propres limites. Ils ont creusé des galeries entières dans la roche vive, puis taillé des sarcophages massifs dans des pierres si dures qu’aucun outil connu de leur époque ne pouvait les entamer. » Ces mots résonnent comme un hommage à un savoir-faire presque surhumain, transmis à travers les siècles.
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Un jour, un chercheur américain aurait soumis les plans d’un de ces sarcophages à une société spécialisée dans la taille du marbre. L’entreprise aurait décliné la commande, jugeant impossible de reproduire une telle prouesse, même avec les technologies contemporaines.
Le culte du taureau sacré
Le mot Sérapéum désigne, à l’origine, les sanctuaires consacrés au taureau Apis, symbole de fertilité et de renaissance, divinisé sous le nom de Sérapis à l’époque gréco-égyptienne. Ce culte fusionnait les figures d’Osiris et d’Apis, unissant ainsi les croyances funéraires de l’Égypte pharaonique à la philosophie religieuse hellénistique.

On retrouve d’autres Sérapéums à Alexandrie, Rome ou encore dans la région du Campo Marzio, mais celui de Saqqarah demeure le plus impressionnant, tant par sa complexité que par son état de conservation.
Des galeries monumentales sous la roche
Sous le sable, un réseau de tunnels longs de près de 400 mètres serpente au cœur du plateau. Une porte discrète ouvre sur un couloir principal de 136 mètres, bordé de 24 chambres funéraires voûtées — preuve que les anciens Égyptiens maîtrisaient déjà l’architecture en berceau. Les parois sont décorées de bas-reliefs et de plaques de plâtre finement gravées, tandis que les chambres abritent d’immenses sarcophages de granite rouge et noir, de basalte, de quartz et de diorite. Seul l’un d’eux porte des inscriptions.

Le plus troublant est la perfection de ces galeries : leurs parois lisses et leur atmosphère tempérée évoquent presque des constructions modernes. Été comme hiver, la température y reste constante — un phénomène encore inexpliqué.
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Des sarcophages défiant la raison
Chacun de ces blocs monolithiques pèse près de 80 tonnes. Ils ont été taillés dans des carrières situées à plusieurs centaines de kilomètres, notamment à Assouan et dans le Sinaï, puis transportés jusqu’à Saqqarah.À l’intérieur, les surfaces sont polies à la perfection, les angles taillés à 90 degrés, un niveau de précision que seules les machines industrielles modernes peuvent atteindre. Comment ces sarcophages furent-ils sculptés, transportés et déposés dans des galeries aussi étroites ? La question reste sans réponse. Et plus mystérieux encore : tous sont vides, à l’exception d’un seul. À quoi servaient donc ces gigantesques coffres de pierre ?

Un jour, un chercheur américain aurait soumis les plans d’un de ces sarcophages à une société spécialisée dans la taille du marbre. L’entreprise aurait décliné la commande, jugeant impossible de reproduire une telle prouesse, même avec les technologies contemporaines.
Une énigme sans clé
Ainsi, le Sérapéum de Saqqarah demeure un mystère complet, à la croisée de la science, de la foi et du mythe. Ni sa fonction exacte, ni sa datation précise, ni la technique utilisée pour sa construction ne sont établies avec certitude. Certains chercheurs y voient l’œuvre des dynasties tardives, d’autres évoquent une civilisation antérieure dotée d’une technologie aujourd’hui perdue.

Entre hypothèse scientifique et spéculation archéomystique, le Sérapéum continue de défier notre compréhension du passé. Et peut-être est-ce là sa véritable fonction : rappeler, à chaque génération, combien les anciens Égyptiens savaient conjuguer le mystère à la perfection.
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